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A propos des auteurs

  • Martial Van der Linden est docteur en psychologie, professeur honoraire de neuropsychologie et psychopathologie aux Universités de Genève et de Liège. Une partie de ses travaux est consacrée aux effets du vieillissement sur le fonctionnement dans la vie quotidienne, et ce, dans une perspective plurifactorielle et intégrative.
  • Anne-Claude Juillerat Van der Linden est docteure en psychologie, chargée de cours à l'Université de Genève et psychologue clinicienne spécialisée en neuropsychologie. Après 20 ans en tant que responsable à la Consultation mémoire des Hôpitaux universitaires de Genève, elle a créé et dirige la consultation "Vieillir et bien vivre" à la maison de santé Cité Générations.
  • Tous deux ont fondé en 2009 une association du nom de VIVA (Valoriser et intégrer pour vieillir autrement), qui promeut à l'échelle locale des mesures de prévention du vieillissement cérébral problématique.

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3 juin 2012 7 03 /06 /juin /2012 20:49

Résumé

Au vu de la complexité des facteurs impliqués dans la survenue de manifestations plus ou moins problématiques et évolutives du vieillissement cérébral/cognitif et du caractère essentiellement probabiliste des liens entre mécanismes causaux et déficits, la démarche consistant à attribuer de façon univoque un diagnostic de « maladie neurodégénérative » (p. ex., de « maladie d’Alzheimer ») à une personne (sur base de critères cognitifs, fonctionnels, cérébraux ou même neuropathologiques) est tout particulièrement confrontée à un risque d’erreurs de diagnostic, à savoir le risque d’annoncer l’existence d’une « maladie spécifique » impliquant une détérioration cognitive et fonctionnelle progressive à une personne chez qui  cette détérioration ne s’observera pas ultérieurement.

Peu d’études se sont penchées sur ces erreurs de diagnostic, sur la manière qu’ont les cliniciens d’y faire face et de les annoncer (quand c’est le cas), ainsi que sur les conséquences de ces erreurs diagnostiques (annoncées ou pas) pour la personne, ses proches et son réseau social. Dans ce contexte, Merckelbach, Jelicic et Jonker (2012) ont décrit un cas de diagnostic erroné de « maladie d’Alzheimer » posé par un neurologue chez une femme de 58 ans, dans le contexte d’une évaluation très lacunaire.

Les auteurs ont montré en quoi il existait des similitudes entre les conséquences de ce diagnostic erroné et le phénomène des faux souvenirs. Ainsi, la littérature sur les faux souvenirs montre que la suggestion d’une information fausse est d’autant plus puissante dans la formation d’un faux souvenir qu’elle est fournie par une personne en qui l’on a confiance. Dans le cas décrit par Merckelbach et al., le neurologue s’est présenté lui-même comme un ami de la famille royale des Pays-Bas, ce qui avait impressionné la patiente. De plus, l’information erronée affecte davantage la mémoire quand elle est répétée et connectée à des détails exacts. Dans le cas qui nous occupe, le neurologue a indiqué de façon répétée à la patiente qu’elle souffrait de la « maladie d’Alzheimer ». Dans la mesure où cette information a été introduite au sein de discussions concernant la mère de la patiente (qui avait, elle aussi, reçu ce diagnostic), les résultats du SPECT et son implication dans une recherche sur la « maladie d’Alzheimer », la patiente a développé la ferme conviction que le diagnostic devait être correct. En outre, il a été constaté que certaines personnes insistaient sur le fait que le faux souvenir s’était réellement produit, même après le débriefing (l’annonce du caractère fictif de l’événement). Dans la même perspective, il s’est avéré difficile de modifier la conviction de la patiente. Enfin, il a été observé que l’information fausse ne peut contaminer la mémoire que si cette information est plausible. Or, la patiente avait des plaintes mnésiques et une histoire familiale de « maladie d’Alzheimer », ce qui a constitué un contexte favorable à l’efficacité de l’information erronée.

Ces rapprochements entre diagnostic erroné et faux souvenirs mériteraient une exploration plus systématique, en particulier dans le domaine de la « maladie d’Alzheimer » et aussi du « MCI » (« trouble cognitif léger »). En effet, il y a bien des raisons de suspecter que des diagnostics erronés (conduisant à annoncer l’existence d’une « maladie neurodégénérative spécifique » ou d’un « état prodromique » à une personne chez qui aucune détérioration cognitive et fonctionnelle significative ne se manifestera) se produisent fréquemment.

De façon plus générale, c’est le diagnostic de « maladie d’Alzheimer » en tant que tel qui doit être mis en question. Il s’agirait ainsi de modifier profondément la démarche d’évaluation des personnes âgées, ainsi que la façon d’annoncer les résultats de cette évaluation.

 

Il apparaît de plus en plus clairement que la « maladie d’Alzheimer » ne constitue pas une entité diagnostique spécifique, tant au plan cognitif que neuropathologique.

En effet, il a récemment été reconnu que les déficits cognitifs, psychoaffectifs et fonctionnels qui sont associés à cette prétendue « maladie » peuvent prendre des formes extrêmement différentes (voir notre chronique « Le défi de 2012 : poursuivre et amplifier la résistance à l’approche biomédicale réductrice du vieillissement cérébral et cognitif »). De plus, l’évolution de ces déficits est très variable d’une personne à l’autre, avec, dans de nombreux cas, des périodes longues de stabilité et même, quelques fois, une réversibilité du diagnostic (voir nos chroniques « L’évolution du vieillissement cérébral problématique est très variable tant aux plans cognitif et fonctionnel que psychopathologique » et « Trois exemples de diagnostic réversible de maladie d’Alzheimer »).

Par ailleurs, diverses études d’épidémiologie neuropathologique indiquent que le cerveau des personnes qui ont reçu le diagnostic de « démence » (y compris celui de « maladie d’Alzheimer ») présente fréquemment des caractéristiques neuropathologiques multiples (avec notamment diverses atteintes vasculaires), suggérant la contribution de différents types de mécanismes étiopathogéniques (voir notre chronique « Le vieillissement cérébral/cognitif problématique est associé à de multiples anomalies neuropathologiques »). En outre, un  nombre non négligeable de personnes âgées montrent des changements neuropathologiques, parfois importants, sans avoir manifesté de « démence ».

Ces constats ont amené bon nombre de chercheurs et de cliniciens à défendre une approche qui réintègre les manifestations de la « maladie d’Alzheimer », mais aussi d’autres « maladies neurodégénératives », dans le cadre plus général du vieillissement cérébral, tout en considérant l’influence de différents facteurs de risque (absence d’activité physique et cognitive, stress, nutrition inadéquate, isolement social, problèmes de santé physique, toxiques environnementaux, etc.), qui contribuent à accroître les effets négatifs des phénomènes neurodégénératifs naturels. Le vieillissement cérébral/cognitif est ainsi envisagé en termes de continuum et non plus sur base de catégories diagnostiques spécifiques et son caractère plus ou moins problématique et évolutif est considéré comme dépendant de nombreux facteurs (biologiques, psychologiques, sociaux, environnementaux).

Cette conception, selon laquelle les aspects problématiques du vieillissement cérébral/cognitif sont associés à des réseaux complexes de mécanismes causaux se renforçant mutuellement, reconnaît également que les relations entre mécanismes causaux et déficits cognitifs/affectifs/fonctionnels ont un caractère probabiliste : autrement dit, des causes peuvent simplement changer le risque ou la probabilité que des déficits apparaissent. Enfin, elle considère aussi que le même ensemble de déficits ou symptômes peut provenir de mécanismes étiologiques différents (voir Kendler, Zachar, & Craver, 2011 ; et notre chronique « Penser le vieillissement cérébral/cognitif problématique dans toute sa complexité ! »).

Cette manière différente de concevoir le vieillissement cérébral/cognitif amène aussi à s’interroger sur la fiabilité de la démarche diagnostique suivie par l’approche biomédicale dominante et, plus spécifiquement, sur le risque de diagnostics erronés auquel cette approche conduit. En effet, au vu de la complexité des facteurs impliqués dans la survenue de manifestations plus ou moins problématiques et évolutives du vieillissement cérébral/cognitif et du caractère essentiellement probabiliste des liens entre mécanismes causaux et déficits, la démarche consistant à attribuer de façon univoque un diagnostic de « maladie neurodégénérative » (p.ex., de « maladie d’Alzheimer ») à une personne (sur base de critères cognitifs, fonctionnels, cérébraux ou même neuropathologiques) est tout particulièrement confrontée à un risque d’erreurs de diagnostic, à savoir annoncer l’existence d’une « maladie spécifique » impliquant une détérioration cognitive et fonctionnelle progressive à une personne chez qui cette détérioration ne s’observera pas ultérieurement.

Ce risque d’erreurs sera d’autant plus élevé que la démarche diagnostique se fonde sur une évaluation cognitive, cérébrale et fonctionnelle réduite, se basant sur des critères restrictifs et ne prenant pas en compte la multiplicité des facteurs impliqués dans le fonctionnement cognitif et le statut cérébral des personnes âgées (voir Wolf et al., 2008 ; Larner, 2004). L’utilisation clinique de catégories diagnostiques particulièrement problématiques aux plans conceptuel et méthodologique, telles que celle de « Mild Cognitive Impairment » (MCI ; « trouble cognitif léger »), est susceptible d’accroître encore davantage ce risque (voir notre chronique «Le trouble cognitif léger ou ‘mild cognitive impairment’ : une flagrante myopie intellectuelle »).

Peu d’études se sont penchées sur ces erreurs de diagnostic, sur la manière qu’ont les cliniciens d’y faire face et de les annoncer (quand c’est le cas) ainsi que sur les conséquences de ces erreurs diagnostiques (annoncées ou pas) pour la personne, ses proches et son réseau social. Dans ce contexte, il nous est apparu intéressant de rapporter la description effectuée par Merckelbach, Jelicic et Jonker (2012) d’un cas de diagnostic erroné de « maladie d’Alzheimer ».


Un cas de diagnostic erroné de « maladie d’Alzheimer » (Merckelbach, Jelicic, & Jonker, 2012)

Au tout début de l’année 2000, une femme, âgée de 58 ans, consulte un neurologue d’un hôpital général du fait de ses difficultés de mémoire. Elle est propriétaire d’un magasin et a récemment noté que, pour la première fois dans sa vie, elle a besoin d’un calendrier pour se souvenir de ses rendez-vous. Dix ans plus tôt, sa mère a reçu le diagnostic de « maladie d’Alzheimer » et elle a peur de présenter les premiers signes de cet état. A part des plaintes rhumatismales, son histoire médicale est sans particularité.

L’exploration entreprise par le neurologue a inclus une tomographie d’émission monophotonique (SPECT), qui a mis en évidence une hypoperfusion frontale. Le neurologue a interprété cette hypoperfusion comme le signe d’une maladie d’Alzheimer légère à modérée. Dans le dossier de la patiente, il a estimé le score au MMSE à 22, tout en n’ayant pas formellement administré cette échelle. Il a prescrit 2 x 6mg/jour de rivastigmine (Exelon). Dans les mois qui ont suivi, la confusion a continuellement régné dans l’esprit de la patiente et elle s’est sentie anéantie par ce diagnostic. Le neurologue l’a incluse dans une recherche sur la "maladie d'Alzheimer", qui a notamment impliqué des prises de sang. Pour la patiente, le fait d’être un sujet de recherche a accentué encore davantage l’importance qu’elle a accordée au diagnostic et aux examens médicaux.

Entretemps, son mari a reçu un diagnostic de cancer de la prostate. Comme elle s’inquiétait du fait que les effets secondaires de sa médication pourraient entraver ses capacités de prendre soin de son mari, elle a contacté la ligne d’assistance téléphonique d’un centre de ressources Alzheimer. L’expert de ce centre lui a conseillé de chercher un second avis. A l’été 2000, elle a consulté un neurologue d’une clinique universitaire (un des auteurs de l’article : Cees Jonker). Celui-ci a effectué une anamnèse complète ainsi qu’un examen neurologique. Il a également demandé une deuxième SPECT et une évaluation neuropsychologique (impliquant des tests de mémoire, de perception, d’attention, de langage et de fonctions exécutives, un MMSE et le « Cognitive Screening Test, CST»). Tous ces examens n’ont rien mis d’anormal en évidence. Le neurologue a conclu que l’hypoperfusion frontale mise en évidence par la première SPECT était le reflet aspécifique d’une dépression légère. En effet, quand la patiente a commencé à s’inquiéter de ses difficultés de mémoire, elle traversait une période stressante : elle avait un conflit avec un membre de sa famille, ses activités commerciales étaient très intenses et elle était fatiguée.

Le neurologue de l’hôpital universitaire a passé beaucoup de temps à expliquer ces informations à la patiente. Cependant, il rencontra beaucoup de difficultés à la convaincre qu’elle ne souffrait pas de la « maladie d’Alzheimer ». Ce fut seulement après deux longues séances, durant lesquelles les résultats des tests lui ont été expliqués en détail, que la patiente a commencé à douter du fait qu’elle souffrait de cette « maladie ». Même après ces séances, elle vivait des moments durant lesquels elle était profondément inquiète d’avoir la « maladie d’Alzheimer », en dépit du fait que, indubitablement, elle fonctionnait normalement.

Deux des auteurs de l’étude (Hans Merckelbach et Marko Jelicic) ont récemment interrogé la patiente. Elle a indiqué qu’elle présentait souvent des pensées intrusives concernant le diagnostic erroné. Elle a également tendance à « catastrophiser » de légères difficultés de mémoire. En outre, elle a développé une suspicion et une peur importantes vis-à-vis des hôpitaux, des interventions médicales et, en particulier, des prises de sang (allant jusqu’à présenter les signes d’une phobie du sang).

En 2009 et 2010, deux commissions d’enquête officielles ont mis en évidence que le neurologue de l’hôpital général avait commis des erreurs de diagnostic de « maladie d’Alzheimer » chez de nombreuses personnes. Il a été forcé de démissionner et, en tout, 26 poursuites pour faute professionnelle ont été engagées contre lui et l’hôpital général. La patiente décrite ici n’a pas été impliquée dans ces poursuites, dans la mesure où l’erreur diagnostique dont elle a été victime s’est produite plusieurs années avant qu’elle ne prenne conscience du fait que d’autres personnes avaient engagé des poursuites à l’encontre du neurologue.


Diagnostic erroné et faux souvenirs

Selon Merckelbach et al. (2012), la conviction forte de la patiente selon laquelle le diagnostic de « maladie d’Alzheimer » était correct, en dépit des données contradictoires auxquelles elle a été confrontée, peut être interprétée dans le contexte plus général des faux souvenirs persistants.

De nombreuses études ont montré que le fait de confronter de façon répétée des personnes à une information fausse concernant un événement fictif  pouvait mener bon nombre d’entre elles à développer une récupération détaillée (une « recollection) de cet événement non personnellement vécu. Ces faux souvenirs ont tendance à être robustes : beaucoup de personnes vont adhérer à ce faux souvenir, même si elles sont confrontées à des données contradictoires leur indiquant qu'elles n'ont pas vécu l'événement. C’est, par exemple, le cas de personnes qui ont développé des faux souvenirs d’abus sexuels précoces fictifs suite à une psychothérapie suggestive (Brédart, 2004). Il a été observé que cela prenait plus de temps pour les personnes de rétracter ce type de souvenirs que de les mettre en place (Ost, Costall, & Bull, 2012).

Par ailleurs, fournir une information erronée peut affecter la manière avec laquelle les personnes perçoivent des symptômes. Ainsi, comme le rapportent Merckelbach et al., quand on fournit à des personnes asthmatiques des feedback erronés concernant leurs sons respiratoires, beaucoup d’entre-elles manifestent des difficultés respiratoires indépendamment de leur fonctionnement pulmonaire (Rietveld & Brosschot, 1999).

Plusieurs parallèles peuvent être établis entre le diagnostic erroné et les faux souvenirs. Ainsi, la littérature sur les faux souvenirs montre que la suggestion d’une information fausse est d’autant plus puissante dans la formation d’un faux souvenir qu’elle est fournie par une personne en qui on a confiance. Dans le cas décrit par Merckelbach et al., le neurologue s’est présenté lui-même comme un ami de la famille royale des Pays-Bas, ce qui avait impressionné la patiente. De plus, l’information erronée affecte davantage la mémoire quand elle est répétée et connectée à des détails exacts. Dans le cas qui nous occupe, le neurologue a indiqué de façon répétée à la patiente qu’elle souffrait de la « maladie d’Alzheimer ». Dans la mesure où cette information a été introduite au sein de discussions concernant la mère de la patiente (qui a aussi reçu ce diagnostic), les résultats de la SPECT et son implication dans une recherche sur la « maladie d’Alzheimer », la patiente a développé la ferme conviction que le diagnostic devait être correct. En outre, il a été constaté que certaines personnes insistaient sur le fait que le faux souvenir s’était réellement produit même après le débriefing (l’annonce du caractère fictif de l’événement). Dans la même perspective, il s’est avéré difficile de modifier la conviction de la patiente. Enfin, il a été observé que l’information fausse  ne pouvait contaminer la mémoire que si cette information est plausible. Or, la patiente avait des plaintes mnésiques et une histoire familiale de « maladie d’Alzheimer », ce qui a constitué un contexte favorable à l’efficacité de l’information erronée.

Comme le relèvent Merckelbach et al., cette description de cas ne constitue qu’une illustration isolée des similitudes entre diagnostic erroné et faux souvenirs. Ces rapprochements mériteraient une exploration plus systématique, en particulier dans le domaine de la « maladie d’Alzheimer » et aussi de « MCI ». En effet, il y a bien des raisons de suspecter que des diagnostics erronés (conduisant à annoncer l’existence d’une « maladie neurodégénérative spécifique » ou d’un « état prodromique » à une personne chez qui aucune détérioration cognitive et fonctionnelle ne se manifestera) se produisent fréquemment. Ainsi, nous recevons beaucoup de témoignages et notre expérience professionnelle nous a confrontés à bon nombre de situations traduisant la mise en place de démarches d’évaluation inacceptables et propices à l'établissement de diagnosics erronés.

Il serait également utile d’explorer la situation de personnes ayant reçu le diagnostic de « maladie d’Alzheimer », chez lesquelles manifestement aucune détérioration significative n’est observée ultérieurement, mais dont le diagnostic n’a pas été retiré : comment gèrent-elles, ainsi que leurs proches, cette situation dissonante ?

Attribuer une étiquette diagnostique ne constitue pas un acte neutre. Beaucoup d’étiquettes diagnostiques, dont celle de "maladie d'Alzheimer", véhiculent des stéréotypes très négatifs et peuvent automatiquement façonner, de façon importante, le vécu et les comportements futurs des personnes.

De manière plus générale, c’est le diagnostic de « maladie d’Alzheimer » en tant que tel qui doit être mis en question. S’affranchir d’une approche catégorielle, réductionniste et pathologisante du vieillissement cérébral/cognitif pour prendre en compte la multitude de facteurs (biologiques, psychologiques sociaux, culturels et environnementaux) qui en module l’évolution plus ou moins problématique tout au long de la vie, c’est à la fois changer de paradigme théorique, de méthodes de recherche mais aussi de pratiques cliniques et sociales.  

Au plan de l’évaluation clinique, ce changement d’approche devrait conduire à l’élaboration d’une formulation de cas prenant en compte différents types de processus psychologiques (cognitifs, affectifs, motivationnels, relationnels), qui tente de les intégrer dans une interprétation psychologique cohérente, tout en considérant le  rôle des facteurs sociaux, des événements de vie et des facteurs biologiques. Par ailleurs, plutôt que d’annoncer l’existence d’une « maladie » effrayante et implacable, la transmission des résultats de cette évaluation devrait plutôt mettre l’accent sur ce qui relie la personne aux autres, se focaliser sur les capacités préservées et  les multiples moyens qui peuvent être mis en œuvre pour optimiser son vieillissement et insister sur le fait que, même avec un vieillissement cérébral/cognitif problématique, la personne peut garder une vitalité, une insertion sociale, un sens à son existence et un épanouissement personnel (voir notre chronique « Des changements dans les pratiques d’évaluation et d’intervention des psychologues spécialisé(e)s en neuropsychologie et psychogérontologie sont en marche ! »).


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Brédart, S. (2004). La récupération de souvenirs d’abus sexuels infantiles chez l’adulte. In S. Brédart & M. Van der Linden (Eds.), Souvenirs récupérés, souvenirs oubliés et faux souvenirs. (pp. 13-46). Marseille : Solal.

Kendler, K.S., Zachar, P., & Craver, C. (2011). What kinds of things are psychiatric disorders? Psychological Medicine, 41, 1143-1150.

Larner, A.J. (2004). Getting it wrong: the clinical misdiagnosis of Alzheimer' s disease. International Journal of Clinical Practice, 58, 1092-1104.

Loftus, E.F. (2003). Our changeable memories: legal and practical implications. Nature Reviews Neuroscience, 4, 231-234.

Merckelbach, H., Jelikic, M., & Joncker, C. (2012). Planting a misdiagnosis of Alzheimer's disease in a person's mind. Acta Neurosychiatrica, 24, 60-12.

Ost, J., Costall, A., & Bull, R. (2002). A perfect symmetry? A study of retractors’s experiences of making and then repudiating claims of early sexual abuse. Psychology, Crime & Law, 8, 155-181.

Rietveld, S., & Brosschot, J.F. (1999). Current perspectives on symptom perception in asthma: a biomedical and psychological review. International Journal of Behavioral Medicine, 6, 120-135.

Wolf, S.A., Henry, M., Deike, R., Ebert, A.D., & Wallesch, C.-W. (2008). Verdachtsdiagnose Alzheimer-demenz. Bei welchen patienten erfolgt eine neuropsychologische abklärung? (Suspected Alzheimer's disease. Selection of outpatients for neuropsychological assessment). Nervenarzt, 79, 444-453.

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commentaires

L
Monsieur,<br /> L'article ci-dessus démontre certains problèmes sur la pose du diagnostic de la maladie<br /> d'alzheimer , je me pose la question sur le fait que peut être certains médicaments peuvent induire des en erreur la pose d'un diagnostic ? <br /> Salutations.
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