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17 février 2012 5 17 /02 /février /2012 08:10

« Si j’étais roi, je me méfierais des as »

 

Tristan BERNARD (1866-1947) – Dramaturge français et bon joueur de cartes

 

 

En 2007, François Bayrou ne fut que le troisième homme. Arrivé troisième du 1er tour des élections présidentielles avec 18,5% des voix, il avait passé son tour au moment de donner une consigne de vote entre les deux finalistes Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal. On n’a jamais su pour qui il a personnellement voté, et beaucoup lui ont reproché de s’être défilé au moment où il aurait pu faire basculer le sort de l’élection. Il était potentiellement faiseur de roi.

 

Qui ne dit mot consent. Son abstention a validé de facto la victoire de Nicolas Sarkozy, l’électorat du Modem ayant plutôt voté pour la droite par penchant naturel. Il aurait peut-être suffit d’une recommandation inverse pour faire tout changer, mais comme le disent les élus qui rechignent à s’engager, un candidat éliminé n’est pas propriétaire du vote de ses électeurs.

 

On ne peut pas dire que François Bayrou ait été récompensé de ce silence. Alors que toutes ses troupes à l’UDF ont fait campagne en faveur du candidat UMP et sont ensuite allés à la soupe du Nouveau Centre, le béarnais s’est retrouvé seul avec sa garbure, victime même d’une alliance entre l’UMP et le PS pour le faire battre aux élections municipales à Pau.

 

C’est une constante dans l’histoire des élections présidentielles sous la Vème république. L’élection bascule souvent sur le choix ou le non-choix d’un candidat éliminé. En 1965, Jean Lecanuet apporte son soutien à De Gaulle et assure sa victoire, tout comme Edouard Balladur avec Jacques Chirac en 1995. En 1981, ce dernier apporte un trop faible soutien « à titre personnel » à Valéry Giscard d’Estaing ce qui vaut désaveu et précipite sa défaite.

 

C’est pourtant lui qui en 1974 le fait élire en le choisissant dès le 1er tour contre le gaulliste Jacques Chaban-Delmas. Jacques Chirac sait bien l’importance des faiseurs de roi : en 1988, il est battu faute d’accord durant l’entre-deux-tours avec Jean-Marie Le Pen. Toujours dans le coup, il a même essayé d’être faiseur de roi en 2012, bien que retiré de la vie politique, en ayant apporté un franc soutien à son copain de terroir François Hollande.

 

Mais revenons plutôt à François Bayrou. En 2012, il ne devrait être que le quatrième homme, si l’on en croit les sondages qui ne le créditent que de 12% d’intentions de vote. Prévision comparable à celles de 2007 à la même époque, ce qui ne l’empêcha pas d’obtenir l’excellent résultat que l’on sait. Alors prenons de la distance par rapport aux sondages, qui donnent François Hollande largement vainqueur avec 57% au 2ème tour, et refaisons les comptes.

 

Avec François Hollande (33%), Jean-Luc Mélenchon (8%) et Eva Joly (2%), la gauche n’aurait que 43% des voix, minimum historiquement bas. La droite en aurait donc 57%, ce qui est exactement l’inverse de ce que prédisent les sondages de 2ème tour, mais avec un Nicolas Sarkozy fragilisé (25%) par rapport à 2007 (31%) qui devrait compter sur le soutien de François Bayrou (12%) et de Marine Le Pen (20%) pour faire le plein de voix à droite.

 

Comme cette dernière ne donnera aucune consigne de vote, François Bayrou serait de nouveau le faiseur de roi. Mais son électorat se reportera au moins pour moitié sur François Hollande, alors même que 8 des 20% de Marine Le Pen fera de même. Tout s’explique alors. François Hollande : 33+8+2+6+8=57%. Nicolas Sarkozy : 25+6+12=43%. CQFD.

 

On comprend donc que l’élection se jouera sur le rejet ou non de Nicolas Sarkozy chez ces électorats censés le rallier. Un jeu de vases communicants. C’est pourquoi l’UMP ménage le plus possible le candidat centriste. Mais même si cela évoluera d’ici le 6 mai, la morale de cette histoire est que les vrais faiseurs de roi sont quand même les électeurs, et c’est heureux.  

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commentaires

B
Troublants, ces chiffres. On comprend mieux pourquoi alors que le pays est à droite le président risque de se prendre une râclée.
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J
Je pense que Bayrou appellera à voter pour Hollande pour être 1er ministre. En plus, il vient de critiquer pas mal Sarkozy ce week end.
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