« Ne demandez pas ce que votre pays peut faire pour vous.
Demandez ce que vous pouvez faire pour votre pays »
John Fitzgerald KENNEDY (1917-1963) – Ancien président américain et très exigeant
La France est un pays frivole. Elle vit la crise économique la plus grave des 50 dernières années, subissant son pire chômage depuis 13 ans et sa pire dette depuis des lustres, mais elle le prend sur le ton de la blague. Tout va très bien madame la marquise. Dans la vie faut pas s’en faire. Ça ira. Elle est aussi ruinée que la Grèce et l’Espagne qu’elle moque à longueur de temps, mais elle se permet une rase campagne à parler de halal et à penser dépenser encore plus.
Elle ne s’occupe de rien. La perte du triple A aurait dû l’alerter sur l’état de ses finances et la pousser à les gérer mieux que ça. Or au contraire elle continue de raser gratis. La droite fait des cadeaux électoraux aux riches en limitant à 50% leur taux d’imposition par le bouclier fiscal. La gauche fait des cadeaux électoraux aux pauvres en augmentant de 25% l’allocation de rentrée scolaire. L’un n’est pas plus moral que l’autre. Dans un cas on favorise les rentiers et on pénalise l’activité. Dans l’autre on paie les familles pour faire tourner les grandes surfaces.
On n’a les gouvernants qu’on mérite. C’est la faute aux français si la gauche est aussi bêtement populiste à vouloir le bien-être des masses en croyant faire le bien du pays et la droite aussi peu courageuse pour tenir des engagements impopulaires. Ils veulent moins de croissance pour polluer moins mais plus de pouvoir d’achat pour consommer plus. Ils veulent des petits commerces pour la proximité mais vont dans les grands magasins pour la commodité. Ils exigent un Etat désendetté mais chialent dès que trépasse une prestation sociale. Surtout la leur.
La France est le plus beau pays du monde. Dommage qu’il soit habité par les français, que De Gaulle traitait de veaux. Les européens ne devraient pas les croire sur parole quand ils disent qu’ils vont assainir leurs finances. La commission a constamment tapé sur les doigts de la France - de gauche et de droite - avant la crise quand elle dépassait les critères du Traité de Maastricht. Elle riait. Insouciante et indisciplinée, elle est aussi ingouvernable tant les français ont des besoins contradictoires. Cela mériterait une psychanalyse, or l’analyse est simple.
Les français sont comme leur ancien président : agités, cocasses et excessifs. C’est pour cela qu’ils l’ont tant détesté et que le nouveau qui leur est si différent - méthodique, rigoureux, sobre - les laissera indifférents. Ils ne sont jamais contents. Le bon français est râleur. Il veut changer de gouvernement tous les 6 mois, de président tous les 5 ans et d’avis tous les 4 matins. Tant qu’il y pense, il n’oublie pas de réclamer moins d’impôts, plus d’équipements et plus ou moins d’aides sociales selon qu’il est assisté ou nanti, en forme ou en crise, austère ou prodigue.
C’est un grand enfant. Il ne saurait se prendre en main seul, c’est pourquoi il est tant attaché aux services publics - fierté nationale et exception culturelle - et en devient servile. Ce n’est plus un service mais une obligation, l’Etat devant compenser le manque de vaillance de l’usager. C’est pourquoi le français manque tant d’esprit d’entreprise. Il invoque la prise d’initiative, mais il ne refuse pas le laisser-faire et le laisser-aller. C’est un libéral qui n’agit pas.
Le libéralisme, justement. Le français veut que sa vie privée soit épargnée de la lourdeur administrative et de la pesanteur bureaucratique. Or il est le citoyen du monde qui crache le plus dessus. Pays étatiste par nature et par excellence, la France est encadrée partout, par des règlements, des professeurs ou des assistantes sociales. Mais elle n’est pas cadrée. Le français est un éternel insatisfait, comme le montrent les baromètres de confiance et de bonheur.
L’Etat le meilleur est celui qui intervient le moins et le gouvernement qui intervient pour le bonheur des gens est aussi mauvais que celui qui intervient pour leur malheur. Mais cela, le français ne le sait pas. Il veut la liberté sans la responsabilité. Il veut tout faire lui-même, à condition d’être accompagné. Il veut payer plus pour les autres, si ce sont les autres qui le font. Il veut le changement, mais si cela ne bouscule pas trop ses habitudes. Car il en a peur et ne supporte pas qu’on le lui impose de l’extérieur. En fait il ne saurait le mener lui-même, redoutant trop de ne pas être capable soit d’aller jusqu’au bout soit de s’arrêter à temps.